Simulations sous-marines dans la formation des astronautes
Les environnements sous-marins permettent de simuler les conditions de l’exploration spatiale et offrent à la NASA un cadre pour tester du matériel, mener des recherches et préparer de futures missions dans des environnements extrêmes, tels que la Lune ou Mars. L’immersion sous l’eau recrée l’isolement, les espaces confinés et les ressources limitées auxquels les astronautes sont confrontés dans l’espace.
Il existe une longue histoire d’opérations sous-marines visant à préparer les astronautes aux missions spatiales. La première utilisation d’environnements sous-marins pour l’entraînement des astronautes remonte au début des années 1960, alors que les préparatifs du programme Gemini de la NASA étaient en cours.
Le Neutral Buoyancy Simulator (NBS), un grand bassin situé au Marshall Space Flight Center de la NASA à Huntsville, en Alabama, était utilisé pour simuler l’apesanteur de l’espace. Lorsque le Neutral Buoyancy Laboratory (NBL) du Sonny Carter Training Center à Houston, au Texas, est devenu opérationnel en 1997, il a remplacé le NBS comme principal centre de formation de la NASA pour l’entraînement des astronautes aux sorties dans l’espace et aux activités extravéhiculaires (EVA).
Mesurant 62 mètres de long, 31 mètres de large et 12 mètres de profondeur (soit 202 pieds, 102 pieds et 40 pieds respectivement), le NBL est suffisamment grand pour immerger des maquettes de grands objets, tels que la soute de la navette spatiale ou des sections de la Station spatiale internationale. Les astronautes y passent généralement en moyenne 10 heures d’entraînement pour chaque heure d’EVA prévue lors de leurs missions.

Le programme NASA Extreme Environment Mission Operations (NEEMO) a débuté en 2001 afin de placer des astronautes, ingénieurs et scientifiques en saturation dans un habitat sous-marin et de les préparer aux missions spatiales. Le programme était basé à l’Aquarius Reef Base, au large de Key Largo, en Floride, à une profondeur de 62 pieds (19 m), et offrait un cadre unique pour relever les défis de l’isolement, des espaces confinés et des délais de communication dans des conditions similaires à celles des explorations spatiales de longue durée. Vingt-trois missions ont été menées entre 2001 et 2019, chacune étant axée sur des entraînements spécifiques, notamment le test de techniques d’EVA, le développement d’équipements et l’évaluation des performances humaines sous pression.
Activités actuelles
Le Space Environment Analog for Training, Engineering, Science, and Technology (SEATEST) utilise également l’environnement naturel pour préparer les astronautes aux EVA, mais se concentre spécifiquement sur l’amélioration et le test des outils, de la logistique et des technologies pour les missions lunaires. Le projet SEATEST le plus récent, SEATEST 7, a eu lieu au Wrigley Marine Science Center de l’Université de Californie du Sud, sur l’île Santa Catalina.
Les objectifs étaient d’optimiser le transport du matériel des rovers vers les quartiers d’habitation pressurisés occupés par l’équipage et de soutenir les missions lunaires de longue durée dans le cadre des missions d’alunissage Artemis. Une maquette d’habitat lunaire installée à 9 mètres (30 pieds) de profondeur a permis à l’équipe d’évaluer différentes techniques de chargement et de déchargement du matériel.

Cette mission a réuni cinq astronautes issus de quatre agences spatiales différentes — la NASA, l’Agence spatiale européenne (ESA), l’Agence spatiale canadienne (ASC) et l’Agence spatiale des Émirats arabes unis (UAESA) — pour collaborer étroitement avec une équipe de soutien composée d’ingénieurs, de spécialistes des communications, de médecins de vol et de plongeurs de soutien. Le groupe a testé différents scénarios pour planifier les opérations logistiques futures sur la Lune.
La première mission Artemis visant à poser des astronautes sur la Lune, Artemis III, est prévue pour septembre 2026. Cette mission marquera le retour de la NASA à la surface lunaire pour la première fois depuis Apollo 17 en 1972. L’objectif est d’atterrir près du pôle Sud lunaire, où les astronautes mèneront des activités de recherche scientifique et d’exploration. De nombreux aspects opérationnels de la mission doivent encore être testés et codifiés afin d’améliorer la sécurité et l’efficacité.
Entraînement
SEATEST 7 s’est déroulé en deux phases dans les eaux au large de l’île de Catalina, en Californie. Les structures techniques ont été assemblées et mises en place sous l’eau en août 2024 afin de préparer les simulations. Lors de la phase 2, en septembre 2024, l’équipage et l’équipe de soutien ont effectué une série de tests et de simulations de manutention de matériel.
Huit personnes — dont l’expérience en plongée variait de seulement quatre plongées en milieu naturel à des milliers de plongées — ont participé à la simulation, et tous ont pris part à des activités d’orientation et de révision des compétences. La formation initiale en plongée était un rappel des procédures en eau libre, suivi d’une formation complémentaire selon les normes de l’American Academy of Underwater Sciences (AAUS). Une fois l’habitat lunaire installé sur le fond marin, l’équipage a utilisé des procédures de plongée commerciale.
Les astronautes avaient chaque jour un briefing de plongée et une évaluation de leur condition physique, et s’entraînaient à l’utilisation des outils, des réserves d’air d’urgence et aux procédures de plongeur de sécurité sous l’eau. Trois astronautes et deux membres de l’équipe de soutien ont obtenu une certification de plongée avancée pendant l’entraînement.
L’équipe d’astronautes utilisait des masques intégraux (FFM), leur permettant de communiquer avec l’équipe en surface et le Mission Control Center (MCC), installé dans l’un des bâtiments résidentiels à environ 500 m (un tiers de mile) de là. La plupart des participants n’avaient jamais utilisé de FFM, ils ont donc d’abord suivi une séance d’essayage et de préparation avec ces masques avant d’entrer dans l’eau. En plus des procédures d’urgence habituelles, ils se sont également entraînés à retirer le FFM pour passer à un masque classique et à changer du détendeur intégré à un détendeur secondaire standard, à une petite réserve d’air indépendante et à une bouteille de secours de 5,7 litres (40 pieds cubes).
Les FFM étaient équipés d’un système de communication filaire grâce à une ligne de sécurité. Cette ligne intégrait également une transmission vidéo depuis une caméra montée sur le masque, permettant au MCC d’observer l’équipe en train de travailler et de se déplacer pendant les tâches. La gestion de ces lignes supplémentaires a nécessité encore plus de pratique de la part des plongeurs et des assistants en surface.


La mission
L’objectif de SEATEST 7 était de permettre aux astronautes de répéter des mouvements complexes et des procédures opérationnelles associées à la manutention de matériel sur la Lune. Lorsque des problèmes apparaissaient pendant la pratique dans l’environnement sous-marin, les astronautes les identifiaient et développaient des compétences en résolution de problèmes dans un contexte de faible gravité, une compétence essentielle lors des missions spatiales réelles.
L’équipage travaillait sous l’eau en équipes de deux plongeurs, avec un autre membre de l’équipage servant au MCC et les autres en rotation pour chaque plongée. Chaque astronaute effectuant les simulations de mission portait une combinaison en néoprène blanche de 1 millimètre par-dessus sa combinaison de plongée, et bénéficiait de l’aide d’un plongeur de sécurité personnel pour la configuration.
Le plongeur de soutien aidait à enfiler les Personal Life Support Systems (PLSS) — un caisson qui contient la bouteille de plongée et reproduit la taille du PLSS utilisé sur la Lune — et ajoutait également du lest pour que les plongeurs soient négatifs sur la plateforme sous-marine, gérait les lignes de communication pendant la simulation, retirait les poids à la fin de la plongée et aidait les astronautes à remettre leurs palmes pour la remontée en surface.
Le programme visait à identifier les procédures appropriées pour déplacer le matériel du rover lunaire vers l’habitat, de l’habitat vers le rover, et du rover vers la plateforme de l’habitat, distincte des quartiers d’habitation. L’équipage a testé plusieurs méthodes de transfert de matériel, notamment à l’aide d’un palan (petite grue), d’une tyrolienne, d’un système de poulies et à la main.
Ils ont également évalué différents types de conteneurs de matériel avec divers volumes, formes et poids, ainsi que des bouteilles d’oxygène simulées qui fourniront le gaz respirable dans l’habitat lunaire. Chaque astronaute s’est exercé avec toutes les méthodes, notant les difficultés et défis rencontrés à chaque itération et discutant des solutions potentielles et des améliorations futures.
L’équipe a également simulé l’élimination de la poussière sur le matériel et leurs combinaisons spatiales à l’aide de balais et de brosses avant d’entrer dans le sas de la maquette de l’habitat. Le régolithe lunaire est très cristallin et abrasif, ce qui peut affecter aussi bien le matériel que la santé des astronautes. Inhaler les fines particules de poussière tranchante peut potentiellement blesser les poumons.
D’autres plongeurs de soutien se sont chargés de la photographie et de la vidéographie pour l’évaluation ultérieure de la mission. Plusieurs systèmes vidéo à 360 degrés ont enregistré les données et les opérations depuis des positions statiques sous l’eau.

Conclusion
SEATEST est une application inhabituelle et passionnante de la plongée sous-marine, conçue pour préparer les astronautes à affronter l’inconnu de l’espace. Les données importantes recueillies par les participants sur les procédures de manutention du matériel guideront la prochaine phase de tests et, en fin de compte, les procédures pour les missions Artemis.
En savoir plus
Découvrez le Neutral Buoyancy Lab de la NASA et l’entraînement des astronautes sous l’eau dans ces vidéos.
© Alert Diver – Q1 2025